Facebook : un point sur le boycott "Stop Hate for Profit"

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Adélaïde DE CERJAT

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Cet été, Facebook s’est vu mettre sous les feux des projecteurs pour son manque de censure concernant les discours de haine présents sur son réseau. Des grandes marques ainsi que les nouvelles sur le marché ont lancé une initiative de boycott afin d’alerter ce dernier. Comment ce mouvement de protestation compte-il réveiller Facebook, et a-t-il réellement eu un impact ?

Tout au long du mois de juillet, une quantité de grandes marques et entreprises émergentes se sont liées afin de boycotter Facebook en arrêtant l’investissement dans leurs publicités (dites ads) sur la plateforme. De grands noms tels que Ford, Adidas, Coca-Cola, Verizon, Honda, Starbucks, Microsoft se sont ligués pour contrer le « hate speech ». Selon beaucoup, le magnat des réseaux sociaux ne filtrait pas les messages publiés, ainsi que des messages de haine. Dans un monde de plus en plus axé sur l’égalité sociale et la cohésion, ce manque de censure peut être considéré comme grave erreur envers la santé mentale des consommateurs et l’audience des réseaux sociaux. Comment ce mouvement de protestation compte-il réveiller Facebook, et a-t-il réellement eu un impact ?

Le « hate speech », origine du boycott

Le mouvement « Stop Hate for Profit », qui s’est déroulé en juillet, avait donc pour but de limiter la présence de discours de haine sur les réseaux. Pour de diverses compagnies, ce type de contenu est dangereux non pas pour les messages qu’il promeut mais aussi pour l’image de la marque. Nous le savons bien : là où Facebook était initialement une plateforme de partage de photos de vacances légères, c’est désormais devenu une stratégie marketing bien au-delà de l’individu. Sans filtre, tout message est publiable sur Facebook et un tas de contenus variés se mélangent tout en se complémentant. Une publicité pour Coca-Cola peut donc être suivie d’une vidéo initiant un discours de haine et ainsi impacter l’image de cette marque. Alex Hern, pour le Guardian, dénomme ceci le « brand safety », qui se rattache à l’importance de promouvoir une image de marque orientée vers le futur progressiste et accessible à tous.

La « cancel culture » pour faire bouger le monde

Afin d’obtenir des résultats de Facebook, les marques citées auparavant ont jugé juste de limiter, voire supprimer l’investissement de leurs pubs présentes sur le site. Ceci est un acte qui se retrouve souvent sur les réseaux sociaux, comme nous avons pu le voir dans les mouvements #metoo, #balancetonporc, #blacklivesmatter, et tant d’autres.

L’idée étant un retrait de soutien de la part de l’utilisateur afin d’étouffer la côte de popularité d’une marque ou d’une figure publique. Ici, le réseau social qui permettait auparavant la propagation de cette « cancel culture » devient le centre même de celle-ci. Faisant face depuis plusieurs années à des reproches concernant leur censure non-existante, Mark Zuckerberg n’a pas enclenché d’initiative afin de changer la donne. Dans une période de plus en plus anxiogène et médiatisée, le manque de filtre peut devenir un facteur d’accélération d’insécurité au niveau individuel.

Peut-on réellement se priver d’ads sur Facebook ?

En analysant les retombées, il s’avère que ce boycott n’a pas eu de réel impact sur le revenu de Facebook. En effet, la majorité des revenus de Facebook ne dépend pas seulement de gros annonceurs mais des multitudes de TPE et PME qui utilisent son service publicitaire.

Chiffre d'affaires de Facebook

Evidemment, ce choix demeure symboliquement important grâce aux compagnies multinationales impliquées. Mais ce qui frappe le plus dans ces statistiques est ceux qui sont restés silencieux, par peur de fâcher. La question de dépendance apparaît donc. Le choix d’en faire partie n’est donc pas uniquement politique mais basé sur un choix économique.

Par exemple, selon le New York Times, tous les domaines ne sont pas unanimement impactés par ce boycott. Ce même média parle de la non-implication des domaines de la culture dans ce boycott, notamment Hollywood. Walt Disney Company serait le premier annonceur sur Facebook du 1er janvier au 30 juin, suivis par WarnerMedia, ViacomCBS et Lionsgate, toutes compagnies de diffusion de films. Ces mêmes compagnies ont décidé de se rendre discrètes lors de la campagne de diffamation contre Facebook, ainsi que Netflix et Sony Pictures Entertainment. La justification de ce silence pourrait très bien se retrouver dans la nature des publicités.

Les boîtes les plus présentes dans ce moment de boycott sont celles vendant un produit bien précis, et non un divertissement. Celles-ci peuvent se tourner vers des modes de diffusion autres tels que la télévision, la presse écrite, ou encore les panneaux d’affichage. La Culture s’étant tournée, ces dernières années, vers des publicités plus ciblées sur les réseaux sociaux.

Le boycott est-il la solution ?

Si tout ceci montre à quel point notre économie est interdépendante, le choix de protester a un effet sur le court terme et non durablement. Il a déjà été relevé que certaines boîtes ne peuvent se permettre de boycotter tant leur survie dépend de la visibilité sur les réseaux. Mais nous pouvons également nous pencher sur le fait que Facebook demeure un magnat. Ce boycott a mis en lumière certaines issues et donc Facebook, comprenant l’enjeu commercial, s’est empressé d’embaucher un spécialiste en droits civils afin de réguler le contenu. Mark Zuckerberg démontre qu’il prend en compte son erreur, propose une solution, mais il n’y a en aucun cas sentiment d’urgence, car Facebook se porte plutôt bien. Entre avril et juin, le nombre d’utilisateurs enregistrés sur le site passe de 2,63 à 2,7 milliards. Ceci prouvant que malgré la visibilité de ce boycott, les utilisateurs demeurent présents.

Il est important de prendre en compte que ce boycott a eu lieu sur un mois, et que ses effets auraient pu être plus impactants s’il avait été prolongé sur plusieurs mois. La période estivale est également plus calme au niveau de la consommation. Les entreprises effectuant ce boycott auraient-elles suspendu leurs investissements pendant une période de soldes, de fête par exemple ? Il se peut aussi que toutes ces marques aient eues pour motif de dorer leur image de marque et l’ont fait pendant une période de creux estival. Les retombées économiques pour celles-ci demeurent minimes car, nous le savons bien, l’été est symbolique d’une pause d’échanges commerciaux. Les enjeux en communication ne sont donc pas les mêmes pendant l’été qu’au courant de l’année où les différents marchés se plient aux lois de l’offre et de la demande. Le futur proche nous dira si ce sera finalement Facebook qui se pliera aux demandes des annonceurs, ou si ces mêmes annonceurs céderont aux conditions d’utilisation de la plateforme.

Adélaïde DE CERJAT

Adélaïde DE CERJAT

Rédactrice

Créatrice de contenu, conseils en communication et journaliste freelance. Photographe aux heures perdues !

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